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Maison natale de Jean de La Fontaine à Chateau-Thierry

La maison natale de Jean de La Fontaine

Sa maison natale est devenue un musée (comprenant des autographes, iconographies, documents divers...)

 

NOTICE sur Jean de La FONTAINE

Jean de La Fontaine, né le 8 juillet 162I à Château-Thierry, était fils de Charles de La Fontaine, maître des Eaux et Forêts du duché de Château-Thierry (Maison de Bouillon), et de Françoise Pidoux, fille du bailli de Coulommiers.

Ses premières études furent très négligées : c'est à peine si on lui enseigna le latin. Un jour il reçut en cadeau d'un chanoine de Soissons, nommé Héricart, quelques livres de piété; le goût qu'il prit à leur lecture lui fit croire à sa vocation pour l'état ecclésiastique et il entra en 1641 dans la Congrégation de l'Oratoire à Reims, puis au Séminaire de Saint-Magloire à Paris, y entraînant bientôt son frère.

Quelques mois d'essais suffirent à prouver que ce genre de vie n'avait aucun rapport avec ses goûts d'indépendance et de plaisir.

Jean de la fontaine

Revenu à Château-Thierry, il s'y fit remarquer par ses distractions, son amour du " far niente ", sa vie frivole et son peu de scrupules à satisfaire ses désirs.

Cependant il se détermina au mariage, par complaisance pour ses parents, et, en 1647, épousa une parente du chanoine protecteur de ses débuts dans la vie, Marie Héricart, qui avait de la beauté, de l'esprit, mais qui, bien qu'âgée seulement de 16 ans, aimait beaucoup les romans.

Au même moment il se laissa revêtir de la charge de maître des Eaux et Forêts dont son père se démit en sa faveur.

La maison natale du fabuliste en 1820

Aussi peu soucieux de sa charge que sa femme l'était peu de ses devoirs conjugaux, il commença par les négliger et finit par les abandonner toutes les deux pour venir vivre à Paris, dans cet air de grande liberté qui convenait à son esprit comme à son tempérament.

Rien de plus spontané, de plus involontaire que sa vocation. Une ode de Malherbe, ayant pour sujet un attentat sur la personne d'Henri IV :

Que direz-vous, races futures...

récitée par hasard devant lui, éveilla le sentiment du rythme poétique qui sommeillait eu lui : il avait déjà écrit quelques poésies galantes.

Se mettant à l'œuvre, entouré d'amis, il lut beaucoup et, en 1654, fit paraître son premier ouvrage : une traduction de l'Eunuque de Térence.

Ce fut alors qu'un parent de sa femme, Jannart, substitut de Fouquet dans son office de Procureur général au Parlement de Paris, profita de l'occasion pour présenter La Fontaine au généreux Surintendant, grand amateur et protecteur des lettres, qui lui octroya une pension de mille livres à la condition que chaque quartier serait le prix d'une pièce de vers.

Prenant place dès lors dans le groupe des écrivains et des artistes protégés de Fouquet, il s'y fit aimer par sa bonté toujours expansive et quelquefois naïve, qui lui valut un jour d'être surnommé bonhomme.

De cette époque datent plusieurs Epîtres à l'adresse de Fouquet, et spécialement le Songe de Vaux où il décrivit les merveilles du château de Vaux (près Melun) de son protecteur. La Fontaine connut là son premier succès réel et sut même émouvoir l'opinion publique avec une harmonie touchante quand, la disgrâce royale ayant frappé Fouquet, il termine son Elégie aux Nymphes de Vaux, en disant :

Et c'est être innocent que d'être malheureux,

implorant ainsi la clémence de Louis XIV sans blesser son orgueil et sa puissance. Fouquet lui dut de n'être pas l'objet de la risée publique, mais ce plaidoyer ne fut pas entendu par le Grand Roi qui n'hésita pas à le faire emprisonner.

Après un séjour d'un an à Limoges chez son parent Jannart, qui avait partagé la disgrâce du Surintendant, La Fontaine revint à Château-Thierry. Il avait 43 ans; la jeune duchesse de Bouillon, Marie Mancini, nièce de Mazarin, s'y trouvait alors pendant que son époux guerroyait contre les Turcs. Vive et enjouée, très instruite, aimant tous les plaisirs, même ceux de l'esprit, elle l'accueillit avec bonté et se déclara sa protectrice. Ce fut elle qui l'engagea à écrire ses Contes, historiettes graveleuses dont la licence ne saurait avoir pour excuse une perfection littéraire remarquable, pas plus que l'approbation des censeurs du Roi à leur publication.

Ramené à Paris par la duchesse, La Fontaine fut présenté dans la haute société qui goûta fort son génie poétique. Sa femme l'y suivit mais revint vite à Château-Thierry, trouvant plus convenable une séparation amiable que des inadvertances malheureusement réciproques rendaient presque naturelle. Dans le conte des " Aveux indiscrets " La Fontaine se pose toutefois en moraliste... éprouvé, quand il dit :

Le nœud d'hymen doit être respecté

Veut de la foi, veut de l'honnêteté.

et, dans " Philémon et Baucis ", il ne craint pas de faire allusion à ses soucis intimes, en paraphrasant sur le bonheur de l'état conjugal :

Ils s'aiment jusqu'au bout malgré l'effort des ans ;

Ah ! si... mais autre part j'ai porté mes présents.

Plus tard Marguerite de Lorraine, duchesse douairière d'Orléans, femme de l'oncle de Louis XIV, appréciait le poète et l'attachait à sa personne en qualité de gentilhomme servant.

Mais bientôt la duchesse de Bouillon, que forçaient à s'absenter des aventures galantes et autres affaires graves, puis la mort de la duchesse d'Orléans venaient priver à la fois La Fontaine des bienfaits de ses deux protectrices. Ce fut un moment critique, car La Fontaine, en faisant son épitaphe :

Jean s'en alla comme il était venu

Mangeant son fonds avec son revenu

avait eu conscience de la rapidité avec laquelle il avait dû, pour payer ses dettes, vendre d'année en année tous ses biens les uns après les autres, y compris ceux que son, frère, devenu prêtre, lui avait cédés pour une modique rente viagère. Comme il n'y avait pas communauté entre sa femme et lui, sa femme pouvait heureusement vivre à l'abri du besoin.

Et cependant il lui fallait pourvoir à l'éducation de son fils alors âgé de 14 ans, de qui provint plus tard une descendance qui s'éteignit en 1824.

Madame de la Sabliére retira chez elle La Fontaine et veilla sur lui comme une mère, lui épargnant tous les soucis de la vie matérielle tandis que son fils était recueilli par de Harlay, premier président au Parlement de Paris, qui était un admirateur des ouvrages du poète.

C'est à cette époque en effet que La Fontaine connut une gloire littéraire peu commune.

Dès 1668 les six premiers Livres des Fables paraissaient avec dédicace au Dauphin, dans laquelle La Fontaine précise lui-même son but :

Je chante les héros dont Esope est le père ;

Troupe de qui l'histoire, encor que mensongère,

Contient des vérités qui servent de leçons.

Tout parle en mon ouvrage, et même les poissons :

Ce qu'ils disent s'adresse à tous tant que nous sommes :

Je me sers d'animaux pour instruire les hommes.

Le deuxième recueil, dédié à Mme de Montespan, parut en deux fois 2 Livres en 1678 et 3 Livres en 1679.

Un troisième recueil d'un Livre, dédié au duc de Bourgogne, fut publié en 1694.

Le style du fabuliste possède supérieurement la variété qu'une imagination éminemment capricieuse rendait nécessaire. La Fontaine excelle à dire avec grâce les moindres choses; nulle part les images, qu'il peint toujours de main de maître, ne sentent le travail qui a dû être considérable.

Moraliste par force, La Fontaine décrit surtout ce qu'il a vu ; aussi est-ce presque toujours une morale d'expérience plutôt que de principe qui ressort de ses mises en scènes.

Les lieux où se passent ses histoires sont décrits de façon détaillée et vive; partout se révèle chez lui la faculté artistique par excellence : l'imagination, qui n'excluait pas la sensibilité.

Il n'y a pas de poète dramatique qui ait mieux su mettre en scène ses personnages, les faire parler avec autant d'intelligence et les rendre plus vivants : chaque bête a sa figure particulière, son caractère précis; partout l'homme se reconnaît tel qu'il est et ne peut se froisser je cette bonhomie charmante avec laquelle :

Une ample comédie à cent actes divers

a réussi à être toujours vraie et d'actualité ; rien n'en a péri et c'est bien là une gloire inespérée pour le poète, en s'adressant aux hommes de son temps. d'avoir écrit le livre où au moins en France. les enfants.. et les grandes personnes trouveront toujours d'utiles enseignements.

Bien que ce genre de poésie lui convint le mieux, La Fontaine composa aussi quelques opéras et pièces de théâtre, dont certains furent joués et publiés sous le nom seul de Champmeslé, auteur dramatique, né et mort à Paris (1645-1701), qui collabora avec La Fontaine et dont la femme fut une tragédienne célèbre (1642-1698).

La Fontaine fut reçu à l'Académie Française en 1684, malgré l'opposition mal justifiée de Louis XIV.

Quand Mme de la Sablière mourut, La Fontaine était devenu vieux et une longue maladie J'avait beaucoup affaibli. Où trouver un appui ? Par hasard il rencontre M. d'Hervart. dont la femme compatissante avait préparé à son intention un appartement dans son hôtel. " Je venais vous prier de loger chez moi " , lui dit M. d'Hervart. " J'y allais ", répondit La Fontaine, convaincu d'avance de l'amitié dont il était l'objet.

Devenu sage enfin et sincèrement repentant de la vie " volage en vers comme en amours " qu'il avait menée, le fabuliste immortel s'éteignit doucement à Paris, le 13 avril 1695, entre les bras de son ami Racine, de M. et de Mme d'Hervart qui avaient paternellement entouré ses derniers jours.

G. DELANOUE.   1910.

Château-Thierry

                    Date de la dernière mise à jour : 27 mai, 2003